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John Bost

  John Bost > par Ernest Rayroux

photo John Bost





Jubilé de la fondation des Asiles
(1848-1898)
par le pasteur Ernest Rayroux, directeur général des Asiles John Bost




John Bost est né à Moutiers-Grandval, dans le canton de Berne, le 4 Mars 1817. Fils du pasteur Ami Bost, il lui fut redevable ainsi qu'à sa mère, d'impressions religieuses ineffaçables. À l'âge de 8 ans il fut mis en pension mais, au bout de quelques mois, il réintégra la maison paternelle à cause de maux de tête persistants. Il fut placé peu après comme apprenti, puis comme ouvrier chez un relieur et il y resta jusqu'à 19 ans. Mais il employait tous ses loisirs à étudier la musique — piano et violoncelle — avec une véritable passion. Il quitta même son métier pour donner des leçons tout en continuant à se perfectionner dans son art. C'est alors qu'il fut obligé de servir comme soldat dans la cavalerie genevoise.


Le roi Louis-Philippe et la Confédération se regardaient de travers à cause du prince Louis-Napoléon réfugié en Suisse, après la tentative avortée de Strasbourg. Les meilleures amitiés ne souffrent-elles pas parfois de passagers refroidissements ? On n'en vint pas aux mains, mais l'alerte fut chaude de part et d'autre et notre jeune militaire eut un service assez rude, panaché d'incidents désagréables. Nous ne marquons ces diverses étapes où nous voyons John Bost, tour à tour, écolier, apprenti, ouvrier, artiste et soldat que pour montrer combien les incidents de cette jeunesse toute de labeur et d'imprévu, lui furent utiles quand, plus tard, il fut mis en demeure de dépenser tant d'énergie pour son œuvre et de varier à l'infini ses moyens d'action. Rien donc ne fut perdu de ce qui précéda sa vocation de pasteur et de créateur d'Asiles.


En 1839, il quitta Genève pour Paris afin de se perfectionner dans la musique : il donne des leçons pour en recevoir lui aussi des principaux maîtres. Un brillant avenir semblait lui sourire.


L'avenir fut brillant en effet, mais tout autre qu'il ne l'avait rêvé. On sait comment sous l'influence bénie du pasteur Louis Meyer, qu'il appelait son « père spirituel » il se donna tout entier au Seigneur. La semence de l'Évangile, jetée au fond de son cœur par ses parents jusque-là engourdie, perdue, semblait-il, se réveilla, brisa l'enveloppe de l'indifférence et prit un essor magnifique. Une année passée en Irlande comme précepteur dans une pieuse famille, fortifia en lui le désir intense qu'il avait de devenir pasteur. Son intention était de servir l'Église nationale et en cela, il commit une grave erreur de jugement, car, âgé de 25 ans, c'était perdre de précieuses années pour l'obtention des grades académiques exigés, alors que, par sa culture générale, la flamme de sa foi, la connaissance déjà étonnante qu'il avait de la Bible, il possédait plus que le nécessaire pour être un bon et fidèle ministre de Jésus-Christ. Les Églises libres, s'il l'avait demandé, lui auraient immédiatement ouvert leurs portes. La preuve de cette erreur de jugement se trouve dans le fait qu'au bout de dix-huit mois il fut obligé de renoncer aux études classiques et officielles. Ici M. Théophile Bost ouvre une parenthèse originale. Il trouve que son frère John, doué d'une volonté énergique, la laissait parfois s'emballer jusqu'à l'entêtement. C'est un tort, continue-t-il, que l'on dit avoir rencontré ailleurs, dans sa famille ; on peut ajouter : et autre part. Quant à moi, je reste neutre sur ce point, car si j'ai eu le grand privilège de vivre à côté de John Bost cela a été de trop courte durée. Je n'ai vu que les qualités du chrétien, de l'apôtre, du philanthrope, de l'ami et non ses défauts : le recto de l'homme renouvelé par la grâce de Dieu à l'image du Christ et non le verso. Bien peu après son entrée au collège de Sainte-Foy en 1842, il écrivait donc à l'un de ses frères : « Les études de la sagesse humaine ne sont pas propres à nourrir l'âme du chrétien… Ma consolation est, en dehors des heures de leçons, de parcourir les environs et de tenir de concert avec quelques amis, des réunions religieuses. » C'est ainsi qu'il fit la connaissance des protestants de Laforce sans se douter que bientôt ils seraient ses paroissiens. Dans sa correspondance de 1843 on lit ce qui suit : « Je quitte les études régulières et, par conséquent, l'espoir de devenir jamais pasteur dans une Église nationale ; mais avec l'aide de Dieu je passerai quelques années auprès de M. Adolphe Monod. » Ici encore c'était une influence chrétienne qu'il cherchait et désirait et non la science théologique. Ces quelques années se réduisirent à quelques mois, car en 1844, il reçut un appel pressant de l'Église de Laforce à laquelle le consistoire de Bergerac voulait imposer un pasteur dont-elle ne voulait pas. Renseignements pris, et sur le conseil de ses amis de Montauban, il obéit à cet appel d'âmes troublées et dans la détresse spirituelle. Les débuts furent pénibles, au point de vue matériel s'entend, car le salaire du pasteur la première année ne fut que de 800 francs. Mais M. Ponterie, spacieusement installé à Meynard, vint à la rescousse. Il offrit au jeune pasteur l'hospitalité et à la jeune Église un local pour la célébration du culte. Un des frères de John Bost, le très excellent Théophile, écrit à ce propos : « J'ai souvent fait des séjours à Meynard quand mon frère John fut invité à s'y installer. Nous occupions la même chambre. Il me reste de ce temps de vie commune un souvenir qui ne manquera pas d'édifier cette assemblée. Il était sujet à des insomnies dues à des névralgies. Mais, bien portant, je l'ai vu, maintes fois, prolonger ses veilles ou se lever de grand matin pour vaquer à la prière et à la lecture de la Bible. Il était profondément ému de trouver dans les Évangiles le fait que Jésus se retirait la nuit sur la montagne ou dans les déserts pour prier. À combien plus forte raison n'était-il pas nécessaire au faible disciple de suivre l'exemple du Maître ? La prière était donc pour lui un combat dont-il voulait sortir vainqueur parce qu'il voulait et devait être un fidèle serviteur de Dieu. De là donc ses prières ferventes, en temps et hors de temps. On pourrait dire que tous les chrétiens, tous les pasteurs en font autant. Sans doute ! c'est une question de plus ou de moins. Mais la médiocrité de beaucoup témoigne leur négligence sur ce point essentiel. » « John Bost, c'est toujours le frère qui parle du frère, a recherché la sanctification comme on ferait du plus grand trésor. Quand il fut pénétré, imprégné de l'Esprit de Jésus, il voulut que ses paroissiens fussent participants avec lui de la même grâce. C'est ainsi qu'il a travaillé et comme on dit que rien ne se perd dans la nature, nous ajouterons que rien, non plus, ne se perd dans le monde spirituel puisque aujourd'hui nous célébrons cette fête, ce jubilé qui nous fait voir de nos yeux et toucher de nos mains, pour ainsi dire les conséquences de ces prières, car toute prière, digne de ce nom se résout en un acte tangible. » Il en a été ainsi pour John Bost. Le recueillement en première ligne pour bien écouter et comprendre les ordres du Seigneur, ensuite l'élan pour les exécuter. Il avait une énergie indomptable et aussi une tendresse compatissante, non larmoyante et passive mais virile et entreprenante vis-à-vis de la souffrance. Tout être qu'il rencontrait mutilé dans son corps ou son âme, il s'en faisait aussitôt le serviteur, le protecteur, le père et la mère : tout John Bost est là !


Dès son arrivée à Laforce, il commence l'éducation de ses paroissiens, tout à fait bien disposés à vrai dire. Heureux et reconnaissant de l'hospitalité de Meynard il comprend, lui d'abord, et il leur fait comprendre ensuite que ce n'est là qu'un provisoire ; qu'une communauté vivante, après avoir rompu avec l'ancien ordre de choses, devait accepter toutes les conséquences de cette rupture douloureuse  qu'en conséquence il lui fallait un temple, une maison de prière d'assez belle apparence et solide surtout, pour témoigner de la foi qu'on avait en l'avenir. Après des exhortations publiques et individuelles, pressantes, répétées il y eut un soir, au bourg d'Abren dans la maison du père de Monsieur Étienne Imbert, notre vénéré directeur de Siloé, une réunion qui fut le triomphe de la foi et du sacrifice. Là après un entretien des plus émouvants et d'ardentes prières, la flamme de l'Esprit alluma tous les cœurs. L'érection du temple est résolue et, séance tenante, une souscription est ouverte. Parmi ces paysans les deux plus âgés se lèvent et s'engagent chacun pour 600 fr. À leur suite quatre signent pour 500 fr, d'autres pour 375 fr, 250 fr, 125 fr, jusqu'à 25 fr. Aucun ne reste en arrière ; des domestiques, hommes et femmes s'inscrivent à leur tour. Quant on fit l'addition le total dépassait 8 000 fr.


John Bost avait déjà en lui une mission que ses paroissiens ne soupçonnaient pas, à laquelle cependant ils s'associèrent de tout leur cœur avec un zèle qui nous rend jaloux. Oui certes la jalousie est un vice grossier, mais il y a une sainte jalousie née du désir de réaliser tout ce qui fait vibrer l'âme dans le vaste domaine de l'activité et de la charité chrétiennes, c'est de cette jalousie dont nous parlons, c'est elle qui fait tressaillir nos cœurs. Ah ! ce fut là un moment héroïque et grandement béni pour l'Église de Laforce !


Depuis quelques années, notre presse protestante s'occupait de l'isolement moral et religieux de nos coreligionnaires perdus dans les centres catholiques, sans secours spirituels et en butte à un prosélytisme souvent victorieux. On déplorait cette situation : on en parlait beaucoup — deux habitudes qui depuis lors, ont pris un rude embonpoint — on n'agissait pas. Hélas ! combien souvent l'histoire ancienne se renouvelle et se trouve être de l'actualité !


John Bost après avoir longtemps prié, réfléchi selon sa coutume, se résolut à agir mais avant de se lancer il partit pour Montauban pour soumettre son idée et ses plans à ses amis, en particulier à MM. Adolphe Monod, G. de Félice, Bonifas, professeurs à la Faculté et à Madame Babut. C'est avec eux que la fondation de la Famille évangélique fut décidée en principe. Cette maison devait recueillir plusieurs catégories d'enfants :
- 1° celles de nos coreligionnaires disséminées ;
- 2° les jeunes filles exposées dans un mauvais milieu non orphelines mais comme celles-ci, autant dignes de pitié sinon plus ;
- 3° enfin les orphelines proprement dites.


De retour à Laforce, John Bost mit son Église au courant de ses projets et de la résolution prise. Il va sans dire que les paroissiens qui avaient déjà fait si peu auparavant un sacrifice au delà de leurs moyens pour l'érection de leur Temple laissèrent à qui de droit les dépenses de l'établissement à fonder ; il était d'un intérêt général, c'était donc, non à une Église, mais à toutes les Églises de France et d'ailleurs à s'y intéresser. Toutefois, ici encore les fidèles de Laforce firent preuve d'un dévouement non moins admirable que le premier en s'offrant à faire gratuitement, pour la maison en perspective, tous les charrois nécessaires ! Ah ! Messieurs, cela vous dit peu, sans doute, car vous n'êtes pas des bouviers, ni moi non plus  je n'ai pas en conséquence l'orgueil de m'élire votre professeur. Mais notre cher ami M. Étienne Imbert, lui qui était de cette vaillante phalange vous dira combien alors les routes étaient mal entretenues  quant aux chemins de traverse, ils étaient boueux coupés de fondrières, pénibles à suivre, plus encore pour les bœufs que pour les gens. Il fallait aller chercher au loin les matériaux, à travers tous ces obstacles. « Pauvres gens, disait l'architecte, ils tentent l'impossible ! » Ce mot est suffisant et pouvait économiser ce qui précède. Eh ! bien ces courageux paroissiens ont non seulement « tenté mais réalisé l'impossible. » L'Église s'est chargée de tous les charrois, écrit en 1846, Théophile Bost à ses parents : « il en faudra bien 8000, il y en a déjà 150 de faits. Cela est énorme quand on considère les rudes travaux qu'ils ont à faire pour eux-mêmes selon la saison… Ces pauvres gens partent souvent à une heure du matin pour chercher à trois ou quatre lieues des pièces de bois qu'ils placent sur des charrettes ou bien de gros blocs de pierres et au bout de la course il reste encore à gravir la côte pour atteindre le plateau où se trouvent Laforce et les chantiers de construction. » Un de ces vaillants en soignant ses bœufs constata qu'ils étaient trop faibles pour la double tâche qu'il avait assumée. Que faire ? Se borner au seul travail de son exploitation agricole ? c'était son intérêt. Le brave homme réfléchit longtemps, puis il pria, là, dans son étable et la conclusion de sa prière fut qu'il devait vendre son attelage et le remplacer par un plus vigoureux. Et ainsi fut. C'est donc par la générosité des églises du dehors, unie au dévouement de ses paroissiens que John Bost pût fonder La Famille. L'aile de l'est fut consacrée au Temple et la façade du midi, à l'Asile proprement dit. Plus tard on put ajouter l'aile de l'ouest et donner au bâtiment sa symétrie actuelle. L'inauguration eut lieu le 24 mai 1848. Une jeune fille de Bordeaux fut la première pensionnaire.


La première directrice fut Mlle Peloux, bonne ménagère, aimable en société, m'écrit Monsieur Étienne Imbert, sans avoir ces manières maniérées qui enlèvent à la politesse tout son charme et sa valeur. Elle avait une piété réelle, ancrée sur Jésus-Christ ; elle ne parlait que lors qu'elle avait à dire quelque chose de bon et d'utile  aussi avait elle, sans bruit, une grande autorité ; elle était, à la fois, une Marthe dans sa maison et une Marie aux pieds de Jésus. C'est elle qui prépara avec les enfants ce fameux souper de l'inauguration de la Famille offert par John Bost aux bouviers de l'Église et présidé par M. le Pasteur Frédéric Monod. Les anciens s'en souviennent encore, je ne parle pas du menu, mais des exhortations dont le sel après 50 ans n'a pas perdu sa saveur. Mlle Peloux, décédée en 1874 a été remplacée par Mlle Élise Bourgougnon qui était déjà depuis 15 ans à la maison comme institutrice ; ce long stage et son intimité avec Mlle Peloux l'avaient préparée à cette nouvelle tâche. Toutes deux jusqu'à la fin de leur vie, ont été de précieuses auxiliaires. On peut dire que Dieu les avait choisies et préparées pour John Bost et pour toutes les enfants qui tour à tour se succédaient dans cette maison.



Quelles étaient les vues de John Bost sur l'éducation des jeunes filles ? sur la discipline intérieure ? sur l'enseignement primaire ? surtout sur l'enseignement spirituel ?

Voici ce que j'ai trouvé en relisant les anciens et précieux bulletins rédigés par lui.



Travail manuel

« Les jeunes filles doivent être dressées à tous les travaux domestiques. En 1856, elles étaient obligées pour laver le linge de la maison de se rendre à la rivière (la Dordogne) distante de Laforce déplus d'une demi-heure. Ces courses avaient lieu trois fois par semaine et présentaient des difficultés sans nombre ». C'est alors que fut construit, au dessous du Presbytère, le réservoir et le lavoir encore existants. « Pour notre famille ce lavoir est d'un avantage inappréciable. En été, nos enfants sont à quatre heures du matin au ruisseau (c'est le vocable du pays pour désigner le lavoir) et le soir à 4 heures le linge d'une blancheur remarquable est complètement sec. Il remplit un autre but non moins précieux pendant l'été, il sert de baignoire à nos enfants. Le bassin est exposé en plein midi, les eaux le soir sont presque tièdes. Il n'y a qu'une voix parmi nos amis pour nous féliciter de cette heureuse innovation ». (Rapport de 1856, pages 16 à 22).

« Préparer nos jeunes filles aux devoirs pratiques de la vie, c'est notre désir, notre devoir. Elles appartiennent toutes à cette classe de la société qui, plus spécialement, doit manger son pain à la sueur de son visage  nous ne le perdons pas de vue ; aussi, nous efforçons-nous de les placer, dès leur entrée dans notre famille, en face des réalités de la vie. Le luxe est scrupuleusement exclu de chez nous et souvent nous avons été obligés de renvoyer les trousseaux apportés par les enfants, pour les remplacer par des vêtements plus simples. Le luxe a fait invasion depuis peu d'années surtout dans les classes laborieuses ; nous le déplorons et nous faisons ce qui dépend de nous pour inculquer à nos jeunes filles ce précepte de l'apôtre : « Cherchez non la parure extérieure qui consiste à s'entrelacer les cheveux, à porter des bijoux d'or, à mettre de riches vêtements, mais la beauté cachée du cœur, le charme impérissable d'un esprit doux et tranquille : voilà la vraie richesse aux yeux de Dieu » (I Pierre III, 3-4). Dès, leur arrivée elles sont initiées à tout le service de la maison. Nous n'avons pas de domestiques. Elles font la cuisine (il y avait alors 78 pensionnaires présentes et 4 attendues d'un jour à l'autre : total 82), celle des élèves comme celle des directrices. Elles pétrissent le pain, elles soignent les vaches et les porcs. Elles lavent tout le linge de la maison et le repassent. En été, ce sont elles qui arrosent le jardin. Enfin, elles sont exercées à tous les travaux auxquels une domestique peut être appelée dans une maison bourgeoise. À l'ouvroir elles sont habituées à faire toute espèce de couture et nous les exerçons surtout à raccommoder le linge et à réparer de vieux vêtements. »


« Nos grandes filles, en très petit nombre depuis deux ans, s'occupent du soin des petites, surveillent leur toilette et remplissent auprès d'elles, l'office de bonnes d'enfants. Nous exigeons que toutes choses soient faites avec le plus grand ordre et la plus grande propreté et ce n'est pas, là le côté le plus facile de notre tâche ». (Rapport de 1857, pages 12 à 15).


En 1858, John Bost revient encore sur ce qu'il a dit et redit, car un clou ne s'enfonce pas d'un seul coup de marteau et la répétition n'est pas seulement une figure de rhétorique. Après avoir rappelé les critiques faites aux orphelinats où la personnalité et les énergies morales de l'enfant ne se développent pas ou tout au moins que très imparfaitement, parce qu'elles ne sont pas sollicitées à s'exercer, il dit, page 13 : « Nous n'avons pas de servantes, nos jeunes filles sont tenues à vaquer à tous les travaux du ménage. Elles font la cuisine des élèves celle des directrices… Il est vrai que l'ordinaire de la maison, celui des Directrices comme celui des élèves, est très simple. Nous ne nous flattons pas de faire d'habiles cuisinières mais si une fois, la jeune fille a élé habituée à faire un petit ordinaire proprement et promptement, elle saura sous la direction d'une maîtresse habile acquérir bien vite ce qui lui manque. »



Travail intellectuel

« Le travail manuel vous le voyez avait la plus grosse part. L'instruction cependant n'était pas négligée : elle était nettement limitée. Elle se bornait aux éléments indispensables de lecture, d'écriture, d'orthographe, de calcul et à quelques notions de géographie. On y cultivait cependant avec beaucoup de soin, le chant, et l'une des choses qui frappent le plus les visiteurs, c'est l'ensemble et la précision avec laquelle ces jeunes filles exécutent les morceaux les plus difficiles de notre répertoire sacré.


Instruction religieuse. « Elle est faite avec le plus grand soin. Mais, c'est surtout l'éducation spirituelle que M. Bost a en vue. Aussi s'est-il attaché, par dessus tout, à choisir pour Directrices des personnes d'une piété éprouvée afin de réaliser autant que possible la Famille évangélique. Élevées ainsi dans une atmosphère où souffle constamment un esprit chrétien ces jeunes filles sont dans des conditions plus favorables que la plupart des enfants de nos Églises ; et s'il est un danger pour elles, pour celles surtout qui devront plus tard servir comme domestiques, s'il est, dis-je, un danger contre lequel il faille les prémunir, c'est qu'elles ne s'aperçoivent trop facilement de leur supériorité. Quoique la maison soit tenue avec la plus grande simplicité, l'ordre qui y règne ; l'intelligence avec laquelle tout est conduit ; l'ensemble vraiment remarquable avec lequel tout marche ; la puissance d'assimilation qu'exercé la Famille sur tous les enfants qui y entrent ; la transformation générale et subite qui s'opère dans toute leur manière d'être ; tous ces avantages qui sont autant de titres de gloire pour l'établissement constituent en même temps un danger réel pour ces enfants et je n'hésiterais pas à le signaler à M. Bost si son œil clairvoyant ne l'avait déjà aperçu et n'y veillait ». Deux lettres sur les œuvres de Laforce (pages 13 à 16). Il ne faut pas, en effet s'enorgueillir. Nos enfants à leur entrée sont le plus souvent, fort ignorantes. C'est ainsi qu'à propos de l'arbre de Noël, John Bost demandait à l'une d'elles pourquoi l'Éternel avait défendu à Adam de manger des fruits de l'arbre du jardin ? Parce qu'ils n'étaient pas mûrs, lui répondit l'enfant. À leur sortie, la modestie n'est pas non plus de trop dans leurs bagages. J'ai nommé les collaborateurs et les collaboratrices de John Bost qu'il rencontra au début de son œuvre. Quelques années après il s'adjoignit une aide précieuse entre toutes. Il y avait à Laforce une jeune fille remarquable par son caractère, son intelligence et sa piété, fort attachée aux œuvres religieuses et spécialement aux Asiles qui naissaient les uns après les autres suivant les occasions fournies par le Seigneur à John Bost, et que celui-ci ne laissait jamais échapper, c'était Mlle Eugénie Ponterie qui le 2 Juillet 1861 devint Madame John Bost. Elle fut une aide précieuse à son mari ; avec lui elle travailla de toutes ses forces, de tout son cœur, donnant même de sa fortune aux heures de crise pour le bien et le développement des Asiles.


Depuis la fondation de la Famille jusqu'à aujourd'hui, un peu plus de sept cents enfants y ont été admises. Qu'est-il advenu d'elles ? Les unes ont été fidèles, pieuses, persévérantes. D'autres ont mal tourné. L'ivraie a toujours été mêlée au bon grain. Mais parmi celles qui nous ont navré il en est qui ont été retirées de la fange et sont mortes réconciliées avec Dieu le Père des Miséricordes et avec Jésus toujours en quête de la brebis perdue pour la ramener au bercail. Nous nous efforçons de nous tenir en relation par la correspondance, avec les élèves qui nous quittent pour être placées en France ou à l'étranger. Les succès nous réjouissent sans nous enorgueillir ; les revers nous attristent sans nous décourager. La prière est une grande force, et nous prions. L'espérance est une grande consolation et nous espérons. L'amour est une grande force, et nous aimons.


La Famille évangélique est l'aînée d'une grande famille. Nous lui avons fait aujourd'hui une large place. Nous ne pouvons parler longtemps de ses frères et sœurs, nous nous bornons à indiquer ici le nom, la date de la naissance, et le nombre des pensionnaires qui ont été admis jusqu'à aujourd'hui.


Date de la fondation
   
Nom de l'asile Pensionnaires reçus
24 mai 1848 La Famille évangélique 705
1er janvier 1853 Béthesda (reconstruit en 1892)       437
9 juillet 1858 Siloé 376
6 mai 1862 Ében-Hézer 183
1er septembre 1863 Béthel 208
7 février 1881 La Compassion
4 mai 1874 La Retraite 93
10 juin 1875 Le Repos 70
16 mai 1878 La Miséricorde 92
  Total 2170


Ainsi plus de deux mille déshérités ont été ici recueillis, aimés, soignés, la moitié d'entre eux, au moins, jusqu'à leur dernier soupir.

Actuellement nous avons 550 pensionnaires. La mort de John Bost n'a pas été une cause d'arrêt dans son œuvre car cette œuvre était moins la sienne que celle de Dieu qui est amour, et la charité ne périt jamais. Elle s'est développée au contraire ; elle s'agrandit encore et ces progrès ne laissent pas parfois de nous préoccuper. « Homme de peu de foi », me direz-vous sans doute. Oui, vous avez raison mais tout souci ne crèverait-il pas comme bulle de savon, si nous pouvions vous dire à tous : « Frères et sœurs de grande charité ! »


J'aime les chiffres ; ils ont la précision, cela va de soi, mais ils ont aussi leur poésie. Quand on les fréquente, qu'on sait les manier, on est surpris, ravi, parfois effrayé et humilié de tout ce qu'ils disent et renferment.

En 50 ans, combien a-t-il été dépensé ?

En 50 ans, quel est le bilan des dons reçus par et pour les Asiles John Bost ?

Je vous assure que je voudrais bien le savoir et, qu'à diverses fois, j'ai failli me lancer dans ce double travail, pour moi fascinateur.

Je me suis arrêté, comme devant une tentation du diable, craignant déjouer à Ézéchias montrant ses trésors aux envoyés de Bérodac, Baladan roi de Babylone.


Ce que les Asiles ont reçu depuis 50 ans des Églises de France, de Suisse, d'Angleterre, de Hollande, d'Amérique ? Qu'importe ? Et que nous importe ce qui a été fait si nous ne sommes curieux de le savoir que pour être fiers de charités faites avant nous ou sans nous ? Cela me rappelle le mot que John Bost me jeta un jour où, tout remué d'une tournée faite dans les Asiles en sa compagnie, je lui disais : Quels sentiments de joie et de reconnaissance doivent agiter votre cœur quand vous contemplez votre œuvre ? « Mon ami, me dit-il, je ne regarde pas à ce que j'ai fait mais à ce que j'ai à faire. »

Ah ! la bonne riposte. Voilà l'homme, voilà le chrétien, voilà l'ouvrier de Dieu, ne songeant qu'à faire toujours plus, toujours mieux dans l'humilité et la fidélité entrelacées par la charité.

En conséquence, vous comprenez combien il m'est difficile de vous dire le total des sommes reçues et employées pendant les cinquante années écoulées de la vie de nos Asiles.


pasteur Ernest Rayroux
Pasteur Ernest Rayroux
Directeur des Asiles John Bost
Les Asiles John Bost, Rapport annuel
(1898)

Jubilé cinquantenaire des Asiles de John Bost (1848-1898)

Cinquantenaire de la fondation des Asiles John Bost par le pasteur Joël Laforgue

Discours du missionnaire François Coillard

Souvenirs par son frère Élisée Bost

Discours de Timothée Bost & Réponse aux frères Bost par Henri Couve

Rapport sur l'œuvre de Laforce par Ernest Rayroux, Célébration du troisième centenaire de l'Édit de Nantes (1898) à Nantes



John Bost : index des documents

portraits de John Bost : photographies & gravures



Notice historique de la fondation des Asiles de Laforce par John Bost (1878)

L'église chrétienne considérée comme asile de la souffrance : thèse de John Bost présentée à la faculté de théologie de Montauban (1880)

Asiles de Laforce en 1878 : liste des bâtiments & résidents

La Famille - Béthesda - Ében-Hézer - Siloé - Béthel - Le Repos - La Retraite - La Miséricorde

Le temple des Asiles

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